Article de François Limoge, paru dans l’Argus de l’Assurance, le 30 mai 2024.

La proposition de loi déposée par la députée Astrid Panosyan-Bouvet (Renaissance) prévoit l’obligation par l’employeur de prendre en charge au moins 50% de la cotisation de l’assurance invalidité, incapacité, décès. Le texte entend aussi contrecarrer une récente décision de la Cour de cassation.

Voilà une proposition de loi sur la prévoyance qui ne manquera pas de faire réagir les assureurs, mais également les représentants des syndicats et du patronat. La député Renaissance Astrid Panosyan-Bouvet vient de déposer un texte qui entend modifier en profondeur la protection sociale complémentaire des salariés dont les modalités sont négociées par les branches professionnelles et les entreprises.

Le texte signé par 30 députés de la majorité présidentielle – issus des groupes Renaissance, Modem et Horizon – « s’inspire des principes d’application des accords nationaux interprofessionnels (ANI) précédents comme l’ANI de 1947 sur la prévoyance des cadres et l’ANI de 2013 sur la complémentaire santé obligatoire pour tous ». En rappelant que ce dernier accord des partenaires sociaux avait également prévu l’ouverture de discussions sur la prévoyance qui ne sont jamais tenues.

Généralisation de la prévoyance en avril 2027
Dans son article 2, la PPL Panosyan-Bouvet pose effectivement le principe d’une généralisation de la prévoyance collective obligatoire à compter du 1er avril 2027. Elle se matérialise par l’obligation pour tous les employeurs de prendre en charge au moins 50% de la couverture invalidité, incapacité ou décès de leurs salariés. Le montant de la cotisation est « fixé a un minimum de 1,5 % de la rémunération inférieure au plafond de la sécurite sociale ».

D’abord des négociations dans les branches professionnelles
Cette généralisation de la prévoyance collective interviendrait en deux temps avec :

1/L’ouverture avant le 1er janvier 2025 par les organisations syndicales et patronales de « négociations au niveau de chaque branche dans lesquelles les salariés ne bénéficient pas d’une prévoyance ou disposent de garanties insuffisantes en la matière » ;

2/La tenue entre le 1er février 2026 et le 1er avril 2027 de négociations dans toutes les entreprises dotées de délégués syndicaux et non couvertes en prévoyance collective, et cela afin d’instaurer « des garanties conformes aux stipulations de la convention ou de l’accord de branche ou, à défaut, satisfaisant aux critères fixés par la loi ».

3,5 millions de salariés non couverts en prévoyance
En s’appuyant sur les données du Ctip et du groupe Vyv, Astrid Panosyan-Bouvet estime à 3,5 millions le nombre de salariés du secteur privé encore non couverts en prévoyance. « Outre le bénéfice clair pour le salarié, la prévoyance obligatoire pourrait être un attribut fort de l’attractivité de la marque employeur dans un contexte de tensions croissantes sur le recrutement et la fidélisation des équipes », peut-on lire dans l’exposé des motifs.

Un passage chez AXA et Groupama
Diplômé de HEC, de Sciences Po et de Harvard, Astrid Panosyan-Bouvet connaît bien le monde de l’assurance. Elle a travaillé au GIE AXA et au sein de Groupama où elle a notamment exercé les fonctions de secrétaire générale du groupe. Conseillère d’Emmanuelle Macron, alors ministre de l’Economie et des Finances de François Hollande, elle a participé à la création d’En Marche. L’élue de la 4ème circonscription de Paris avait publié en juin 2023 dans les Echos une tribune sur la nécessaire généralisation de la prévoyance collective, en souhaitant que les partenaires sociaux l’inscrivent à leur agenda social. Syndicats et organisations patronales n’ont toutefois prévu qu’un diagnostic sur la prévoyance.

Maintien de garantie pour les salariés licenciés

Au-delà de la généralisation de la prévoyance, la PPL Panosyan-Bouvet prévoit dans son article 4 que «l’organisme assureur doit assurer le maintien des couvertures complémentaires santé et prévoyance pour les salariés licenciés même en cas de résiliation du contrat avec l’entreprise qui les employait ». Une mesure qui va clairement à l’encontre d’un récent revirement de jurisprudence de la Cour de cassation.

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