Article de Stéphane Davet, paru dans Le Monde, le 30 janvier 2025.

La voix de Marianne Faithfull s’est tue.

La chanteuse, actrice, icône du rock et autrice britannique, est morte, jeudi 30 janvier, à l’âge de 78 ans.

Sa voix de rocaille racontait l’histoire d’une vie pleine d’embardées. Marianne Faithfull avait survécu aux montées trop euphoriques des années 1960, aux descentes vertigineuses des années 1970, aux rechutes des années 1980, à un corps souvent brisé depuis les années 2000.

Overdoses, arrêt cardiaque, cancer du sein, Covid-19… A chaque fois, la chanteuse, autrice et actrice anglaise, avait ressuscité, en se réinventant, dépassant ses statuts d’intime des Rolling Stones, de junky maudite ou d’icône rock, pour s’affirmer avec caractère, humour et puissance créatrice, comme l’une des plus marquantes de la chanson internationale. Mais cette aristocrate indomptée a fini par succomber.

Femme de caractère, elle repartait pourtant à l’attaque, sur scène, pour déclamer des sonnets de Shakespeare, accompagnée par le violoncelliste français, Vincent Ségal, ou pour enregistrer de nouveaux albums (le jazzy, Easy Come, Easy Go, en 2008 ; Horses and High Heels, en 2011 ; Give My Love to London, en 2014), entourée d’admirateurs comme Nick Cave, Ed Harcourt, Mark Lanegan, Brian Eno ou Warren Ellis.

Après avoir été l’objet d’un émouvant documentaire, Marianne Faithfull, fleur d’âme, réalisé par Sandrine Bonnaire, en 2016, elle avait enregistré un dernier disque, Negative Capability (2018), des chansons à vif où elle disait vouloir parler « d’amour et de solidarité ». Dans They Come at Night, elle évoquait les attentats parisiens du 13 novembre 2015 (elle avait rejoué au Bataclan, le 24 novembre 2016), et dans Born to Live, le souvenir de son amie Anita Pallenberg, autre intime des Rolling Stones, disparue en 2017.

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En avril 2020, atteinte du Covid-19, elle avait frôlé la mort. Plongée dans le coma, en soins palliatifs pendant des semaines, elle avait résisté à cette nouvelle épreuve. Marianne Faithfull réussissait même à terminer, en duo avec le multi-instrumentiste Warren Ellis, She Walks in Beauty, un recueil de poèmes romantiques anglais (John Keats, Lord Byron, William Wordsworth…) lus de sa voix rauque. Quelques mois après, Warren Ellis nous avait confié : « Marianne est tout ce que tu penses qu’elle n’est pas. Et elle n’est pas tout ce que tu penses qu’elle estOn l’imagine dure, coriace. Mais elle est aussi incroyablement douce, drôle, poétique, capable de croire aux fées… »

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