L’interview de Olivier Pastré dans Libération donne une bonne synthèse du livre écrit avec Patrick Argus : « L’Economie post Covid : les huit ruptures qui nous feraient sortir de la crise » éd Fayard.

Outre l’analyse claire et instructive sur la profondeur et la nature de la crise qui se noue aujourd’hui, nombre des ruptures proposées et mises en débat croisent des préoccupations exprimées ailleurs, et les mettent en perspective : revenu universel pour les groupes de personnes en difficulté et particulièrement pour la jeunesse ; refonte et renforcement de la formation professionnelle ; planification « sélective » en matière de politique industrielle ; rénovation du financement et transparence du financement syndical…

Il convient de noter que dans le livre, Olivier Pastré consacre un chapitre au mutualisme, notamment bancaire, qui aurait un rôle important à jouer dans cette crise s’il retrouvait ses fondamentaux. Apport pour le moins original qu’il convient de souligner.

Et là, on pointe une des contradictions du propos : qui peut être contre un capitalisme inclusif qui limiterait la rentabilité du capital exigée par les actionnaires, qui augmenterait le taux d’imposition des profits, qui privilégierait une politique industrielle orientée vers l’emploi, et une internalisation des externalités de toutes natures… humaines, sociales, environnementales ?.. sauf que !

En se contentant d’une « approche morale » de l’économie, y compris pour traiter des « ruptures », on s’interdit de voir un patronat qui ne joue pas le jeu, et d’agir sur un acteur qui ne respecte aucun de ses engagements en matière de création d’emploi, de politique industrielle, de répartition en matière de salaire et un Etat qui privilégie sans cesse la baisse du coût du travail au détriment d’une autre forme de vie en société.

Là où Olivier Pastré nous fait mal, nous les mutualistes, c’est qu’il voit bien la capacité que nous aurions à peser de façon concrète et efficace sur les politiques publiques avec un peu de courage et pour autant que nous fassions ce que nous disons à longueur de tribunes, démocratiser l’économie !

De la même façon que pour l’épidémie, le véritable succès n’aurait pu venir que d’une implication massive des populations dans sa maîtrise, la véritable rupture vers une économie plus inclusive passe par une implication méthodique des populations (salariés, consommateurs, mais aussi mutualistes, coopérateurs, …), de l’associassionisme dans la transformation concrète, ici et maintenant, des pratiques économiques.

Par Jean SAMMUT

Président de la Mutuelle Les Solidaires

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